Dégradation de la note du Sénégal : Madana Kane plaide pour une restructuration courageuse de la dette

La récente décision de l’agence Moody’s d’abaisser la note souveraine du Sénégal à Caa1 avec perspective négative continue de susciter de vives réactions dans les milieux économiques et financiers.

Parmi les voix qui s’élèvent, celle de Mouhamadou Madana Kane, banquier et spécialiste en droit international, ancien directeur général de la Banque islamique du Sénégal et président du parti Dundu, apporte un éclairage critique et pragmatique.

Selon M. Kane, le Sénégal n’est ni en défaut de paiement ni en situation de restructuration de sa dette, mais subit pourtant les mêmes effets que les pays confrontés à ces difficultés.

« Le rythme de dégradation de la note du Sénégal suit la même tendance que celle des pays déjà en défaut ou en restructuration. En d’autres termes, le Sénégal subit les mêmes effets que les pays dans une situation plus grave », a-t-il souligné.

Face à cette spirale négative, l’ex-banquier estime qu’il est temps d’envisager un reprofilage ou une restructuration ordonnée de la dette publique.

« Puisque le choix de ne pas restructurer la dette ne semble pas payant au regard de la dégradation continue de la notation, le Sénégal ne devrait-il pas se résoudre courageusement à restructurer ou reprofiler cette dette, afin d’alléger les pressions de liquidités et de restaurer les marges de manœuvre budgétaires ? », s’interroge-t-il.

Pour M. Kane, cette option relèverait moins d’un aveu d’échec que d’un choix stratégique, face à un système financier international dont les règles ne tiennent pas toujours compte des réalités économiques des pays africains.

« Qu’on soit ou non d’accord avec les agences de notation ou le FMI, les règles du jeu financier international sont aujourd’hui ce qu’elles sont, construites autour de ces institutions », explique-t-il.

L’économiste avertit par ailleurs que la dégradation de la note souveraine a des conséquences directes sur le coût du financement extérieur : « Une note dégradée signifie que le pays doit payer un risk premium plus élevé pour emprunter sur les marchés, c’est-à-dire emprunter plus cher, alors que le service de la dette pèse déjà lourdement sur les finances publiques. »

Enfin, M. Kane alerte sur un autre signal préoccupant : l’absence d’un accord avec le FMI. « C’est un véritable red flag pour les investisseurs étrangers qui, entre deux destinations d’investissement, privilégieront naturellement celle où le risque pays est moindre et où la caution du FMI est présente », conclut-il.

Partager